Présidentielle palestinienne: sacré peuple!

Présidentielle palestinienne: sacré peuple!

Au terme d’un scrutin rendu singulièrement difficile par l’occupation israélienne des territoires palestiniens, le favori, Mahmoud Abbas, a été élu président de l’Autorité palestinienne. Le score de la gauche n’a pas été pour autant marginalisé. Une première analyse de notre camarade Michel Warshawski.

Sacré peuple, que le peuple palestinien: depuis plus de quatre ans, il subit une guerre de pacification brutale et sanguinaire de la part des forces d’occupation israéliennes. Une guerre qui a non seulement provoqué la mort de milliers de civils, détruit des milliers de maisons, déraciné des centaines de milliers d’arbres fruitiers, réduit en poussière la plupart des infrastructures administratives, mais qui a aussi littéralement découpé le territoire – et donc la population – en des dizaines de zones séparées les unes des autres.

En dépit de cette catastrophe, qui n’a rien de naturel, il s’est investi avec énergie, responsabilité, voire souvent avec enthousiasme, dans une campagne électorale qui va durer encore près de six mois. Le mois dernier, un taux de participation de plus de 80% aux élections municipales partielles, et cette semaine près de 70% des inscrits ont participé au scrutin. Puis, ce sera la seconde tranche des élections municipales pour terminer par les élections au Conseil législatif, clé de voûte de la démocratie palestinienne.

Ces chiffres n’ont rien d’évident. On connaît les difficultés extrêmes de mouvement, imposées par le bouclage israélien à l’ensemble de la population palestinienne. On sait également le danger que représente souvent la circulation d’une ville à l’autre, d’un village à l’autre. Deux hypothèses couramment véhiculées par certains médias s’écroulent: quatre ans de destruction et de répression n’ont pas détruit la capacité de résistance des Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, loin de là.

N’en déplaise à tous ceux qui parlaient de dictature imposée au peuple, nous sommes témoins de la solidité et de la légitimité des institutions et des mécanismes démocratiques institués par Yasser Arafat, lorsque ce dernier disposait encore d’une autonomie relative. Les fauteurs de chaos et leurs porte-parole ont clairement échoué… Comme on pouvait s’y attendre, Mahmoud Abbas, numéro deux de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) avant la mort de Yasser Arafat, a été élu avec une majorité substantielle: près des deux tiers des votants.

Après le retrait de la candidature de Marwan Barghouti, dirigeant politicomilitaire très populaire, secrétaire général du Fatah de Cisjordanie, condamné à la prison à vie par les autorités d’occupation israéliennes, Mahmoud Abbas (Abou Mazen) avait le soutien de l’ensemble du mouvement Fatah. La principale force d’opposition, le Hamas, avait appelé au boycott, sans pour autant mener une campagne active pour que la population n’aille pas voter.

La grande surprise est le score impressionnant du docteur Mustafa Barghouti1 (près de 20% des suffrages), sur un programme de réformes démocratiques et de participation populaire à la lutte nationale. Le docteur Barghouti est l’ancien secrétaire général du Parti du peuple palestinien (ex-Parti communiste) et le fondateur d’une des plus grandes organisations non gouvernementales de Palestine, le Secours médical. C’est une jeune personnalité d’une grande droiture qui, en outre, avait le soutien du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et du docteur Abdel Shafi, personnalité emblématique du mouvement national dans l’ensemble des territoires occupés et au-delà.

Si l’on ajoute les voix obtenues par les candidats du Front démocratique de libération du peuple (FDLP) et du Parti du peuple, la gauche démocratique a recueilli, dans ces élections, plus d’un quart des voix. Ce qui peut peser dans l’avenir, à condition toutefois que cette gauche arrive à trouver les voies de l’unité. Une fois de plus, les médias internationaux manipulent un événement significatif pour des centaines de milliers de Palestiniens…

Michel WARSCHAWSKI

  1. Nous avons publié une interview de Mustafa Barghouti dans notre n°44 du 27/04/2004, on peut la retrouver sur notre site www.solidarites.ch