Prenons les choses en main…

Prenons les choses en main…

La seconde victoire de Bush, du parti de la guerre et de la domination impériale, détermine l’approfondissement du cours réactionnaire de la politique mondiale, marqué par la «guerre sans fin», l’accroissement des inégalités sociales, la mise en péril des écosystèmes et l’érosion des droits démocratiques. La campagne des milieux dominants pour l’adoption d’une «Constitution» européenne néolibérale va dans le même sens, sans parler de l’élection du nouveau grand inquisiteur, le cardinal Ratzinger, à la tête de l’église catholique…

Le néolibéralisme apparaît de plus en plus comme la politique du capitalisme réellement existant. Il vise la marchandisation du travail, du milieu ambiant, de la vie et de la culture humaine, aux seules fins de garantir la hausse continue des profits, notamment par la privatisation croissante des biens et des services publics. C’est un système discriminatoire, prédateur, injuste, répressif et anti-démocratique. En Europe, il a déjà conduit à la marginalisation de 70 millions de pauvres, de 20 millions de chômeurs-euses, et de dizaines de millions d’immigré-e-s. Il ne peut pas être infléchi ou réformé: il doit être profondément transformé.

En Suisse, le parti de la globalisation néolibérale règne en maître. Qu’il se réclame de l’UDC Blocher ou du radical Merz, il est au service de multinationales extrêmement puissantes… Celles-ci exploitent près de deux millions de salarié-e-s hors du territoire helvétique, principalement en Europe, et servent des dividendes princières à leurs actionnaires… En Suisse, un quart de la fortune totale est ainsi concentrée entre les mains de 12000 personnes!

Au cours de ces 10-15 dernières années, la droite patronale est parvenue à imposer l’intensification du travail, la stagnation des salaires réels, la précarisation de l’emploi, un temps de travail parmi les plus élevés d’Europe, et l’absence de protection légale contre les licenciements. D’où le développement d’un climat de stress, de souffrance et de peur croissant… En même temps, elle a tout fait pour faire reculer la solidarité: défiscalisation des fortunes privées, des capitaux, des gros revenus, des transactions financières et des profits; réduction des transferts en faveur des plus démuni.e.s et fragilisation des assurances sociales.

Au cours de ces 10-15 dernières années, l’UDC est devenue le premier parti de Suisse et s’est vue confier par la droite un second siège au Conseil fédéral, celui de Christoph Blocher. Elle a opéré un tournant populiste, se posant en championne de la Suisse d’en bas et faisant ainsi recette de la peur et de l’insécurité sociale pour désigner pêle-mêle les requérants d’asile, les étrangers, les chômeurs, les handicapés, les bénéficiaires de l’aide sociale, femmes et hommes, comme autant de «profiteurs», responsables de la dégradation des conditions de vie. En opposant entre elles les victimes de la mondialisation capitaliste, elle a réussi à exonérer ses principaux responsables, les gros actionnaires de La Suisse S.A.

La gauche politique et syndicale continue en revanche à chanter les louanges d’une collaboration «du moindre mal» avec les «milieux économiques», se contentant de stigmatiser «un certain patronat», responsable du dumping social. Au plan politique, elle continue à revendiquer un compromis au centre, avec le PDC et une partie des Radicaux, excluant l’UDC. C’est avec un tel discours, que le PSS a soutenu la 11e révision de l’AVS ou la Loi libéralisant le marché de l’électricité (LME), qu’il est entré en matière sur le nouveau projet de Loi sur les étrangers, explicitement raciste, qu’il a traîné les pieds pour combattre le paquet fiscal, pourtant nettement rejeté par le peuple, ou qu’il refuse aujourd’hui de soutenir le référendum contre l’abolition du droit de timbre…

Face au durcissement des milieux dominants, nous appelons au contraire à la résistance. Nous refusons en effet un système économique qui enrichit une minorité au détriment de la majorité, qui dégrade chaque jour davantage nos conditions de travail et de vie, qui généralise l’insécurité sociale et privatise le service public. Nous défendons au contraire des relations sociales qui encouragent l’égalité, notamment entre hommes et femmes, qui privilégient la solidarité au travail, dans la formation, dans la vie de quartier et l’habitat, au détriment de la compétition effrénée et de la loi de la jungle.

C’est pourquoi, nous cherchons à dégager de chaque expérience de mobilisation les lignes de force d’un projet de société alternatif, d’un autre monde. Au moment où il devient de plus en plus difficile de gagner au quotidien sur des objectifs limités, il importe de ne pas réduire nos ambitions, au risque de sombrer dans l’aménagement de l’intolérable. Bien au contraire, pour assurer chacun de nos pas, il faut aussi relever la tête afin de redessiner ensemble l’horizon commun de nos luttes!

Jean BATOU