Contre les médicaments marchandises

Contre les médicaments marchandises


Face au poids et aux choix de l’industrie pharmaceutique, il devient nécessaire et urgent de dégager des principes de base d’une logique solidaire.



Les produits thérapeutiques, que les humains ont su identifier dans la nature au cours des siècles, savoir que l’on retrouve dans certaines médecines traditionnelles, ont été progressivement retirés d’un patrimoine commun partagé au profit du mode de production capitaliste aujourd’hui généralisé.



L’apparition récente de l’industrie pharmaceutique (Hoffmann-la-Roche est fondé en 1896), dans le prolongement de la révolution industrielle du XIXe, les extraordinaires privilèges dont cette industrie a joui pendant un siècle avec des brevets taillés sur mesure assurant sa rente de situation, ont abouti au début du XXIe siècle à une situation de monopole non seulement sur la production et la vente des médicaments mais sur le vivant lui-même. Il en va donc désormais du patrimoine de l’humanité. Avec les accords de Marrakech sur les ADPIC en 1994, les enjeux de la propriété intellectuelle sont clairement situés au niveau mondial au profit d’une poignée d’actionnaires. La réponse doit être à cette échelle. Elle doit viser la réappropriation collective de ce patrimoine par la définition d’un bien public mondial.1 Dans la perspective du dépassement de la logique capitaliste, et pour promouvoir des politiques de santé publique nationales dignes de ce nom, nous proposons de défendre les premiers principes suivants en ce qui concerne les médicaments:

  1. Les choix dans les priorités de recherche et développement des produits thérapeutiques doivent être décidés démocratiquement à l’échelle internationale en fonction des besoins sanitaires des populations.
  2. L’appropriation privée des savoirs sur le vivant et sur les médicaments par les brevets doit être abolie. L’ensemble des connaissances acquises dans le domaine de la biologie, de la génétique et des médicaments doit appartenir au domaine public.
  3. La production des médicaments doit être confiée à des entreprises internationales, nationales ou régionales publiques. Ces entreprises doivent se coordonner au niveau international dans un réseau mondial pour la promotion industrielle pharmaceutique publique pour l’intérêt de l’humanité. Un contrôle de qualité doit en garantir la sécurité sanitaire.
  4. La distribution et la vente des médicaments doit se faire sous la responsabilité et le contrôle des pouvoirs publics. La prescription par les professionnels doit être réglée en fonction de leur compétences et selon les risques présentés par les différents produits thérapeutiques.


Ces propositions devraient être débattues au sein de solidaritéS afin de les défendre au sein du mouvement contre la mondialisation néo-libérale.



Gilles GODINAT

  1. A qui appartient la connaissance?, par Philippe Quéau, directeur de la division de l’information et de l’informatique de l’Unesco, Le Monde Diplomatique, janvier 2000