Swisscom – une seule solution… une vraie renationalisation!

Swisscom – une seule solution… une vraie renationalisation!

En novembre, le Conseil fédéral annonçait vouloir privatiser à 100% Swisscom. Suite à une série d’interpellations, le National a débattu – en urgence – de la question le 14 décembre. Ce débat a largement porté sur la «stratégie de communication» en la matière du Conseil fédéral. Sur l’opportunité d’interdire à Swisscom le rachat de l’opérateur irlandais Eircom, sur les péripéties boursières de l’action Swisscom, sur l’opportunité de privatiser beaucoup plus ou totalement l’entreprise, sur l’intérêt financier comparé de la vente totale ou de la conservation dans le «portefeuille» fédéral des actions Swisscom, comme «poule» aux œufs plus ou moins dorés. Notre Conseiller national, Pierre Vanek est intervenu quant à lui dans ce débat au nom du groupe «A gauche toute!» pour défendre une position claire: la renationalisation. Extraits de son intervention…

«On vit aujourd’hui le dernier acte d’une pièce dont le rideau s’est levé en 1997/98, au moment du démantèlement des PTT, que nous avons combattu et qui a mis tout le secteur des télécommunications dans ce pays sur les rails de la privatisation […] ceci en violation de la Constitution fédérale et de son article 36 de l’époque et sans consulter le peuple.

Sur cette voie de la privatisation, l’essentiel de la route a, malheureusement, déjà été fait. Aujourd’hui encore, le Conseil fédéral, sous l’impulsion de Messieurs Blocher et Merz, met en œuvre […] le programme ultralibéral sur la base duquel ils ont été élus! Ils veulent désengager totalement la Confédération de ce secteur, en invoquant notamment les conflits prétendus entre les rôles de la collectivité comme «propriétaire» d’un côté et comme «régulateur» de l’autre.

Pour nous cette dichotomie typiquement néolibérale, est passablement absurde. Elle peut, en effet, servir de manière générique d’argumentaire pour démanteler n’importe quel service public. Les citoyen-ne-s, les citoyens, les usagers-ères et les travailleurs-euses de la branche, dont l’Etat est censé être le représentant, ont en effet à nos yeux autant le droit de se prononcer sur les règles de fonctionnement – les «conditions-cadres» […] d’un service public – que sur les orientations, des plus immédiates aux plus stratégiques, du développement de celui-ci.

Mais c’est l’orientation néolibérale qui prévaut au Conseil fédéral, l’Etat devant, selon lui, être uniquement réduit au deuxième rôle de «régulateur», et encore a minima tant que faire se peut, pour laisser libre jeu à la dynamique de la «concurrence», des forces du marché, etc., et des prétendues lois de celui-ci. Ceci aboutira, en fait, au contrôle à terme de tout ce secteur vital par des monopoles privés transnationaux, dont l’activité se développera avec comme unique boussole le profit maximum de leurs actionnaires, au détriment du service public et de l’emploi…

Les débats autour du coup de roulette au casino boursier, volontaire ou non, maladroit ou non, auquel se serait livré le Conseil fédéral – où les uns crient et pleurent que Swisscom a perdu des milliards de francs de valeur en quelques jours, alors que d’autres les contredisent avec véhémence – démontrent que cette «valeur»-là n’a aucun rapport avec la réalité de la valeur d’usage concrète que Swisscom produit tous les jours pour ses usagers. Cette «valeur» prétendue, cette orientation boursière, ne saurait donc d’aucune manière nous servir de boussole.

Un référendum sera évidemment lancé contre cette décision du Conseil fédéral de privatisation à 100 pour cent de Swisscom, cette fin de parcours de la privatisation, si celle-ci devait trouver une majorité dans ce Parlement. Cette bataille […] peut et doit être gagnée par le très large front de tous ceux qui refusent aujourd’hui les potions ultralibérales pour en avoir vu les effets concrets depuis des années, tant en Suisse qu’aux quatre coins de la planète.

Mais on ne pourra pas rester au milieu du gué. Dans une récente déclaration, parue dans l’Agefi le 12 décembre, le patron de Swisscom lui-même le reconnaît. Jens Alder y déclare en effet […] que si cette privatisation de Swisscom échoue, il faudra «renationaliser». Or, renationaliser, réellement, ne signifie pas simplement retrouver une propriété à 100% de Swisscom par la Confédération; cela demande impérativement de développer une logique non boursière, non marchande et des mécanismes de contrôle démocratique nouveaux qui font défaut aujourd’hui. C’est le sens, d’une initiative parlementaire du groupe «A gauche, toute!» que je représente à cette tribune et que je déposerai à l’issue de ce débat…


Initiative parlementaire du groupe «A gauche toute!»

Une loi-cadre doit être élaborée prévoyant la renationalisation de Swisscom sous forme d’une entreprise de droit public, non cotée en bourse. La loi devra garantir notamment:

  • une propriété à 100% publique de Swisscom et des infrastructures nécessaires à son activité, pouvant associer le cas échéant à celle-ci d’autres collectivités publiques que la Confédération (cantons, communes);
  • des formes renouvelées de contrôle citoyen et démocratique de l’entreprise, en y associant en particulier les usagers et les travailleurs de celle-ci, tant sur le plan des objectifs stratégiques que sur le plan de la gestion concrète de son activité;
  • la mise en œuvre d’un plan de développement à long terme du service public en matière de télécommunications mettant l’accent sur l’amélioration et l’extension du champ des services de base offerts à la population dans toutes les régions du pays à des conditions identiques;
  • une pleine prise en compte des dimensions démocratiques, sociales et écologiques du développement de ce secteur d’activité:
  • une régulation du domaine des télécommunications qui consacre le primat légitime du service public sur la logique marchande ou financière et qui puisse dans ce sens s’appuyer sur un monopole de service public dans tous les domaines où celui-ci répond à l’intérêt général;
  • une structure tarifaire qui mette l’accent sur la plus large accessibilité des services de base pour toutes les catégories de la population, l’objectif de ces derniers ne devant pas être de dégager de quelconques profits, ni être le vecteur d’une fiscalité indirecte.