Election du procureur général: contre Zappelli ou pour Paychère?

Election du procureur général: contre Zappelli ou pour Paychère?

Citoyen-ne-s de Genève,
irez-vous choisir notre prochain Procureur général le 20
avril 2008? Locataires, irez-vous choisir celui qui prononcera votre
expulsion lorsque vous n’arriverez plus à payer votre loyer?
Squatters, irez-vous décider d’être évacué
par François Paychère ou par Daniel Zappelli?
Si
le procureur général a de nombreuses tâches, celles
qui touche le plus directement les habitant-e-s de ce canton sont les
évacuations. Examinons donc dans quelle mesure le candidat
Paychère, s’il était élu, pourrait se comporter
différemment du magistrat Zappelli.

Commençons par les squats. Daniel Zappelli déteste
tellement les squatters qu’il est prêt à tout pour les
évacuer, même à violer la loi. Alors que pour les
tribunaux, les squatters sont des habitant-e-s qui doivent être
évacués seulement en présence d’un jugement, pour
Daniel Zappelli ils sont des criminels et n’ont aucun droits.
D’où ses manoeuvres illicites pour aider les
propriétaires du canton à évacuer leurs biens:
ordre de commencer les travaux ou arrestations des habitant-e-s. Daniel
Zappelli affirme de vouloir rétablir la doctrine Bertossa?
Mensonge, puisqu’il ne tolère pas la création de nouveaux
squats!

Expulsion d’habitants…

Le Procureur Paychère pourra rétablir une doctrine
Bertossa améliorée: refuser d’évacuer les
personnes qui trouvent un abri dans des locaux maintenus
délibérément vides et n’évacuer des lieux
occupés depuis longtemps que sur présentation d’un
jugement d’évacuation.

La question des locataires touche la plupart d’entre nous. En Suisse,
un locataire en retard de quelques mois dans le paiement de son loyer
s’expose à la résiliation de son bail,
irréversible même s’il réussit par la suite
à rattraper son retard. Certains procureurs, d’ailleurs de
droite, refusaient de prononcer l’évacuation de locataires tant
et aussi longtemps que ceux-ci étaient à jour dans leurs
paiements; ils considéraient en effet que les
propriétaires ne subissaient aucun préjudice. Sous la
pression des propriétaires, cette pratique a
évolué et Daniel Zappelli fait systématiquement
exécuter les jugements d’évacuation même si les
occupant-e-s sont à jour dans leurs paiements, ce qui permet
ensuite aux propriétaires de relouer…plus cher! Merci Monsieur
le Procureur!

La marge de manoeuvre du candidat Paychère est claire: il
pourrait réactiver la pratique de tolérance à
l’égard des occupant-e-s qui sont à jour dans leurs
paiements, puisque la loi lui permet explicitement de surseoir à
des évacuations pour des motifs humanitaires. Il existe une
marge de manoeuvre pour mettre en oeuvre une volonté politique!

Tolérance zéro… pour les uns

Fondamentale est la question de la politique criminelle. Daniel
Zappelli se fait le chantre de la «tolérance
zéro»: les forces de l’ordre et la justice ne doivent rien
laisser passer. Toute infraction, la plus petite contravention ou le
moindre délit doivent être poursuivis et leurs auteurs
punis. Cette pratique se justifie par une extension du proverbe
«qui vole un oeuf vole un boeuf»: mettons le voleur d’oeufs
en prison, il comprendra qu’il ne doit pas voler des boeufs et il n’y
aura plus de voleurs de boeufs.

On constate aujourd’hui les effets pervers de cette politique: la
police et la justice ont des capacités limitées, alors
que le nombre d’infractions commises chaque jour dans une ville est
infini. Si un agent de police a pour instructions de ne tolérer
aucune infraction, il va passer ses journées à amender
des collégien-ne-s qui fument du hash, des gitan-e-s qui font la
manche et des petits dealers qui vendent bon an mal an leurs trois
boulettes par jour. Ce brave policier, après avoir
verbalisé tout ce beau monde, n’aura bien entendu ni le temps ni
l’énergie de remonter les réseaux par lesquels les
dealers se fournissent en stupéfiants ni de découvrir
quel banquier offre ses services pour blanchir le produit de ces
infractions.

Impunité pour les gros

Dans les faits, la tolérance zéro, c’est mettre en prison
les petits délinquants désargentés qui agissent de
façon visible sur la place publique et laisser faire les grands
criminels fortunés qui agissent dans la discrétion,
derrière les murs des banques ou au sommet des administrations
publiques. On arrête les voleurs d’oeufs et on laisse courir les
voleurs de boeufs. Un homme de gauche devrait utiliser le droit de
manière rationnelle pour poursuivre en priorité les gros
criminels, ceux qui mettent en danger l’équilibre social par des
pratiques telles que la corruption, le trafic international de
stupéfiants, le blanchiment d’argent sale.

Spéculation immobillière…

Dans le domaine de la lutte contre la corruption, le Procureur Daniel
Zappelli a brillé par son inefficacité: depuis six ans,
il répète qu’il a le dossier de la BCGE sous son coude.
Pourtant rien ne bouge. Tout s’explique quand on constate que les
avocats des inculpés écrivent des lettres de soutien
à Daniel Zappelli dans la Tribune de Genève. Dans
l’affaire du 25, rue du Stand, un immeuble acheté 16 millions de
francs par l’Union bancaire privée est revendu quelques mois
plus tard à la Ville de Genève pour 30 millions de
francs. Après une spectaculaire perquisition dont la presse
avait été informée en violation du secret de
fonction, plus rien ne s’est passé. Le dossier est lui aussi
«sous le coude» du magistrat Daniel Zappelli.

Violences policières…

Selon le rapport d’Amnesty International, les violences
policières sont fréquentes à Genève, et le
système pénal est inadapté à la poursuite
de ses auteurs. Daniel Zappelli ne montre aucune volonté de
poursuivre efficacement les policiers violents. Au contraire, il se
satisfait de quelques condamnations mineures et fait traîner les
cas compliqués dans lesquels les victimes ont besoin de l’aide
de l’Etat pour établir la culpabilité des policiers. Un
procureur de gauche devrait mettre sur pied un système efficace
permettant aux victimes d’obtenir rapidement une enquête
approfondie et impartiale, afin que justice se fasse.

Daniel Zappelli est un homme de la droite dure, qui met la justice au
service de la droite dure. François Paychère est un homme
intelligent et intègre, très légaliste, dont on
peut espérer qu’il fera une politique judiciaire de gauche
ou du centre. Une petite bouffée d’air frais pour tous les
citoyen-ne-s qui ne font pas partie du gratin
politico-économique de notre République.

Pierre Bayenet