Palestine: mission civile suisse, une sale guerre

Palestine

Mission civile suisse: une sale guerre


Une trentaine d’internationalistes sont partis de Genève le 27 mars à l’appel du Collectif Urgence Palestine et ont effectué plusieurs visites et participé à de nombreuses manifestations publiques dans les Territoires occupés et en Israël. Ils sont rentrés le 4 et le 6 avril 2002. Un de nos amis se trouve toujours dans le quartier général de l’Autorité nationale palestinienne à Ramallah. Ce texte est un premier -trop bref- résumé des résultats de notre voyage.



Nous avons vu des scènes d’attentats, des maisons et des rues où ont été tués des victimes civiles des deux côtés; nous avons vu des chars, des hélicoptères Apache et des F-16 de l’armée israélienne en action. Un journaliste parti avec la mission a pu voir plusieurs cadavres à la morgue de Ramallah dont les blessures par une seule balle à la tempe sont des indices quasi incontestables d’exécutions sommaires.



Mais nous avons aussi pu rencontrer de nombreuses personnes et organisations et visiter de nombreux lieux, où nous avons pu constater aussi les effets d’une violence structurelle dont est victime avant tout la population palestinienne et Arabe israélienne.

  • Lors de visites en Cisjordanie (les 28 et 30 mars au 5 avril) et à Gaza (du 31mars au 3 avril), nous avons vu les humiliations et la brutalité quotidienne que vit la population palestinienne sous l’occupation de l’armée israélienne. Bloqués par l’armée israélienne dans le camp de Dheishe près de Bethléem, des membres de notre mission ont constaté des violations gravissimes du droit international humanitaire, l’empêchement des soins aux blessés, etc.
  • Nous avons constaté de très nombreuses destructions méthodiques d’infrastructures civiles, économiques et sociales de la société palestinienne. A Ramallah l’armée n’a pas bombardé seulement le quartier général d’Arafat et de la police palestinienne, mais elle a détruit d’innombrables sièges d’ONG, des services sociaux, les infrastructures sanitaires, même le grand Théâtre de Ramallah a été détruit.
  • A Gaza, qu’on peut définir sans hésitations comme étant une grande prison où sont enfermées 1,2 million de personnes, empêchées dans leurs déplacements non seulement à l’extérieur, mais à l’intérieur même de ce territoire divisé en trois parties, nous avons vu l’Apartheid et la colonisation à l’œuvre. Des gens attendent souvent depuis plusieurs jours pour se déplacer d’une zone à l’autre. Nous avons vu des champs de cultures ravagées et des oliviers arrachés par les bulldozers de l’armée, les puits d’eau bouchés, les pêcheurs dont le travail est rendu quasiment impossible par toute une série d’obstacles posés par la marine israélienne. Nous avons vu aussi les ruines de la station de la télévision palestinienne et nous avons rencontré les ONG palestiniennes qui s’efforcent de soigner une société au bord du gouffre psycho-social.
  • Et même en Israël, dans ce désert du Néguev où l’armée suisse teste les bombes à fragmentation qu’elle produit avec l’armée israélienne, nous avons vu, le 30 mars, les champs de fourrage et les pâturages des Bédouins, Arabes Israéliens, détruits par des désherbants chimiques pour les expulser de leurs terres (zone de Rahet, désherbage au gramoxone du 14 février 2002).
  • A Jérusalem, Tel-Aviv et devant la prison militaire de Haïfa (2 avril) nous avons vu le courage des Femmes en noir et des objecteurs et des insoumis Israéliens, des pacifistes de Ta’Ayush (de l’arabe, vivre ensemble), qui continuent leur lutte malgré la répression et malgré le fait que eux aussi sont parfois les victimes des attentats suicides. Nous avons assisté à la répression brutale de manifestations pacifistes, dont celle du 3 avril au check point d’A-Ram, où trois mille manifestant-e-s israéliens, palestiniens et internationalistes ont accompagné un convoi d’aide humanitaire destiné à Ramallah assiégée. Une partie du matériel a pu être acheminé, une autre est restée bloquée ou détruite par l’intervention des forces de police et de l’armée, qui ont blessé une vingtaine de manifestant-e-s dont un membre de la Knesset et un membre de la mission suisse qui a eu un bras cassé par des coups de matraque.


Ce que nous avons vu en Palestine et en Israël, ce sont les conséquences de l’état de guerre permanent.



C’est une guerre permanente d’un système d’Apartheid qui par la répression militaire veut d’un côté maintenir toutes les richesses et les privilèges, et de l’autre écraser avec une arrogance et une violence brutale toute résistance et révolte des opprimés, de ceux et celles qui n’ont plus rien.



Nous avons été en Palestine parce que ce système d’Apartheid, avec son exploitation et sa répression brutale, est le même système que les puissants de ce monde, veulent appliquer partout dans le monde: en Amérique Latine, en Afrique, en Asie et faire de l’Europe et des pays riches une forteresse militarisée aux frontières fermées à tous ceux et celles qui cherchent ici à vivre une vie digne de ce nom.



Ce système est inacceptable et il ne pourra pas réussir.



En tant que pacifistes suisses, nous exigeons du Conseil fédéral l’arrêt immédiat de toute collaboration militaire de la Suisse avec l’armée et l’industrie militaire israélienne.



Tobia Schnebli

membre du GSsA et de solidaritéS